En 2012, la compilation Hymne à la Liberté avait marqué les esprits. Elle proposait une relecture contemporaine des chants patriotiques algériens, portée par une nouvelle génération d’artistes. Présentée le 3 juillet 2012 lors de la cinquième édition du Serial Taggeur Show à la salle El Atlas de Bab El Oued, l’œuvre fut saluée pour sa créativité.
Organisé en partenariat par Alger Chaîne III et l’ONDA, l’événement illustrait la volonté d’une jeunesse de renouer avec son patrimoine musical tout en le projetant vers l’avenir.
Alayki Minni Salam (Recois mon Salut) – Chemsou Freeklane
Initialement interprété par la troupe artistique du Front de Libération nationale avant l’indépendance, cet hymne national retrouve une nouvelle vie.
Écrit par Halim Dammous et mis en musique par Abdel Rahman Aziz en 1963, le chant fut repris par l’Orchestre de la Radio algérienne, celui de la Télévision et l’Orchestre de l’Opéra d’Alger.
Dans cette version moderne, Chemsou Freeklane prête sa voix pour rapprocher ce patrimoine des jeunes d’aujourd’hui.
Ledzayer Tahya (Vive l’Algerie) – Kawthar
Interprété à l’origine par Nna Chérifa, grande figure du achewiq, ce classique du répertoire patriotique retrouve ici une seconde jeunesse.
Kawthar en signe une réinterprétation acoustique douce et moderne, qui rend hommage à la mémoire musicale algérienne tout en la rendant plus accessible.
Djazaïrana ( Notre Algérie) – Ayoub Medjahed
Ayoub Medjahed, figure montante de la pop algérienne, revisite l’un des hymnes les plus emblématiques de la guerre d’indépendance.
Écrit par Muhammad al-Shabouki et composé par Muhammad al-Ruba’i, Djazaïrana célèbre l’identité nationale et la fierté d’un peuple.
L’artiste y mêle modernité et héritage, offrant une approche respectueuse et novatrice à ce symbole fort de résistance.
Oued Chouli (Le fleuve Chouly) – Les Jaristes
Ce chant populaire rend hommage à Raïs Benallel, héros tombé lors des affrontements d’Oued Chouli à Tlemcen en 1956.
Magnifiée par la voix de Cheikha Rimitti, cette œuvre est devenue un repère de la mémoire collective algérienne.
Le collectif oranais Les Jaristes, aux influences entre raï, rock, jazz et chaâbi, en propose une relecture audacieuse.
Portée par Abdelkrim Derkaoui au chant et Ghizlane Chaibi au violon, cette version allie énergie et recherche artistique.
Hamat Al ‘Majd – Hayet Zerrouk
En 1982, Omar Bernaoui écrit cette opérette nationaliste en hommage à la nation et à ses combattants.
Mise en musique par Chérif Korbti, elle rend hommage à l’Armée de Libération nationale (ALN).
Hayet Zerrouk revisite ce classique dans une version jazzy pleine d’énergie.
Sa lecture contemporaine relie les générations sans trahir l’esprit combatif du texte original.
The Mess & Co – Ya Chahid El Watan
Né de la plume du Palestinien Ibrahim Touqan (1905-1941) et mis en musique par Al Amin Bashishi, cet hymne panarabe a profondément marqué l’imaginaire révolutionnaire algérien.
The Mess & Co, collectif issu de l’Orchestre EBAN, en propose une réinterprétation harmonique et polyphonique d’une grande justesse.
Les voix de Youssra, Senda Bontella, Nadir Fenek, Anis Chami et Chamssedine se mêlent dans une interprétation qui transcende les époques et ravive l’émotion des paroles.
Linda Blues – Min Jibalina (De nos montagnes)
Ce poème en arabe classique, signé en 1931 par Mohamed El Aïd Al Khalifa, devint un hymne fédérateur pour les Scouts Musulmans Algériens.
Mis en musique onze ans plus tard, il forgea l’âme patriotique d’une jeunesse militante.
Linda Blues s’approprie cet héritage avec une approche sensible et affirmée.
Sa voix confère une dimension nouvelle à ce chant des combattants et crée un lien entre passé et présent.
Mawtini (Ma patrie ) – Democratoz
Écrit par Ibrahim Touqan et composé par les frères Mohammed et Ahmed Flayfel, ce chant d’origine palestinienne s’est diffusé en Algérie dans les années 1950 et 1960.
Democratoz en propose une version reggae audacieuse, mêlant esprit panafricain et influence jamaïcaine.
Avec cette adaptation libre, le groupe prouve que l’engagement musical peut aussi être un espace de liberté et de créativité.
De la pop au rock, du gnawa au reggae, chaque reprise offre une lecture contemporaine qui rapproche ces hymnes historiques des oreilles d’aujourd’hui. Cette compilation demeure un geste artistique audacieux qui fait dialoguer mémoire et modernité. Elle prouve qu’honorer l’histoire ne signifie pas la répéter à l’identique, mais la faire vivre autrement. En insufflant des sonorités actuelles à ces chants de résistance, Serial Taggeur a offert aux nouvelles générations un pont entre passé glorieux et présent musical, démontrant que la transmission la plus fidèle est souvent celle qui ose transformer.
